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LE FACTEUR DU CENTRE VILLE DE CHATEAUDUN

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LE FACTEUR DU CENTRE VILLE DE CHATEAUDUN

Actualité locale
Publié le 11/03/2020 - Mis à jour le 11/03/2020

LE FACTEUR DU CENTRE VILLE DE CHATEAUDUN

Le facteur aux airs de chapelier fou de Châteaudun

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« J?ai évidemment quelques détracteurs, mais ce n?est pas grave. L?essentiel, c?est que les gens s?amusent. » - thibaut guillon

Il ne passe pas inaperçu? C?est normal, c?est fait exprès. Philippe Berthaud ose les chapeaux les plus fous en exerçant son métier de facteur. Ce qu?il aime dans cette profession qu?il va quitter, c?est le relationnel.

Des colorés, des bizarres? Une douzaine de chapeaux ou bonnets, quelques casquettes et deux perruques composent la collection d'étranges coiffes, arborées au quotidien par ce facteur dunois. Des formes insolites, des matières variées? Depuis son vestiaire, Philippe Berthaud peut incarner tout un bestiaire : « J'en ai avec des poils qui ressemblent à des souris, une tête de taureau avec des cornes, une tête de loup? »

Certains bonnets sont plus « classiques » - c'est lui qui le dit ? mais toujours flashy. Les jours les plus fous, il enfile carrément une tenue intégrale de poussin pour assurer sa distribution. Il déambule alors sur son vélo jaune et déclenche l'amusement des passants au fil de ses nombreux arrêts pour distribuer le courrier aux habitants du centre-ville de Châteaudun.

Philosophie

Cette lubie l'a pris il y a quatre ans, quand on lui a confié la distribution dans ce secteur. « J'avais des bonnets dans mon placard dont je ne me servais qu'à la montagne. Je trouvais l'hiver un peu dur ici, les gens faisaient grise mine? Ma première idée, ça a été de faire quelque chose pour Noël, j'ai commencé comme ça. »

L'essai s'est montré concluant : « Ça a égayé beaucoup de regards. » Alors, il a continué.

Oui, il y a bien une philosophie sous son chapeau. « À la base, c'est vraiment pour ouvrir l'esprit des gens et faire sourire, et ça marche très bien. » Tellement, qu'il a droit à des réflexions quand il n'a rien sur le crâne. « On me dit : 'tiens, vous êtes normal aujourd'hui'. Je réponds 'mais non, je suis déguisé en facteur !' »

Alors comment effectue-t-il son choix, le matin, devant sa glace, entre le look bestial et les dreadlocks fluo ? « Ça peut changer assez régulièrement. Déjà pour les laver, et puis, si les gens s'habituent, il n'y a plus le petit regard en coin avec le 'ah, tiens, je ne le connaissais pas celui-là'. Ça fait perdurer. » Ne pas laisser l'habitude s'installer, tel est surtout ce qui guide sa main dans la garde-robe.

« Je trouvais l'hiver un peu dur ici, les gens faisaient grise mine? »

Certains sont des cadeaux de clients encourageant sa fantaisie. « J'ai évidemment quelques détracteurs, des réflexions de clients du type 'il est pas bien lui de faire ça', mais ce n'est pas grave. L'essentiel, c'est que les gens s'amusent. » Il s'arrête, réfléchit et lance : « Je pense que j'ai fait pas mal partie de l'animation de la ville, au final. »

Et c'est bien l'entretien de ce lien social qui anime Philippe Berthaud. « C'était la base du métier autrefois. Il disparaît, et c'est dommage. » Derrière la veste bleue et le logo jaune, il se sent investi d'un rôle : « Les gens ont besoin de parler. Le facteur, c'est un peu le phare dans la ville. Quand ils ne le voient pas, il manque quelque chose. »

Alors qu'il s'apprête à effectuer sa dernière tournée, le mardi 2 juin, il replonge dans le passé : « Quand on déménageait les grands-parents, on tombait sur des piles de courriers qui racontaient leur histoire. C'était ça aussi qui faisait la force de la relation, les gens correspondaient à travers nous. Cette trace va disparaître. »

Mais les traces laissées par son métier dans le rapport à autrui, elles, sont indélébiles.

Thibaut Guillon